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24/11/2011

Quand un requin « attaque » un pêcheur sous-marin

Il y a quelques jours, trop d’ailleurs car j’aurais voulu poster cet article plus tôt, l’un de vous (Ben pour ne pas le nommer), m’a fait parvenir un lien concernant une nouvelle «attaque» de requin à la Réunion. Décidément. Rien à voir avec les précédentes. Géographiquement d’abord, puisqu’elle ne s’est pas produite du tout au même endroit de l’Île que les autres, ensuite parce qu’elle impliquait cette fois un pêcheur sous-marin.

Mais qu’appelle t-on une attaque exactement ? Il semble en effet qu’il s’agisse d’un mot fourre-tout dans lequel on mélange des choses fort différentes. On lui préfère d’ailleurs aujourd’hui bien souvent les termes d’accidents ou même d’incidents.

Une attaque, d’après le Shark Attack Files, est une rencontre avec un requin qui conduit à ce qui est perçu comme une agression (je dis bien « perçu » car bien des morsures sont en fait des morsures d’inspection du point de vue du requin) que le requin morde ou donne un coup. Un requin mordant un pêcheur décrochant un hameçon pris dans ses mâchoires constitue donc une attaque, mais une attaque provoquée.

Car on distingue deux sortes d’attaques : provoquées et non provoquées. C’est là que les choses se compliquent. En fait, seules les secondes correspondent vraiment à l’idée que se fait le grand public d’une attaque : un requin qui attaque sans raison apparente un baigneur. Là où les choses se compliquent, c’est qu’à partir du moment où l’homme n’est pas au menu, il est bien souvent difficile de parler d’attaques non provoquées, dans la mesure où chaque attaque possède toujours une ou plusieurs causes. Démystifier les attaques, choses à laquelle s’attèle souvent ce blog, c’est trouver ces causes.

Je ne reviendrai pas sur le fait que l’homme ne figure pas au menu des requins. Cela me semble évident si l’on rapporte une population de requins au nombre d’attaques qu’elle occasionne. Ainsi, au Cap, en Afrique du Sud, on compte en 2011 trois attaques mortelles occasionnées par des grands blancs pour une population d’environ 1000 individus. C’est très peu et si l’homme est au menu, il doit y jouer le même rôle qu’en cuisine une épice très rarement utilisée.

Provoquées ou non, c’est un peu comme pour les homicides, volontaires ou involontaires. La limite est parfois trouble, comme l’eau, comme l’intérieur d’une conscience qui nous est étrangère.

Quoiqu’il en soit, je pense que l’on devrait classer comme « attaque provoquée » l’attaque d’un requin sur un pêcheur sous-marin. Certes le pêcheur n’agresse pas directement le requin la plupart du temps, mais quoiqu’il en soit il chasse et il est normal qu’il ait à faire avec le maître des lieux, celui qui est au sommet de la chaîne alimentaire et avec lequel il entre directement en compétition même s’il ne le perçoit pas forcément lui-même.

L’attaque d’un pêcheur sous-marin est un combat entre prédateurs du point de vue du requin. Que le plongeur se soumette en abandonnant sa proie au requin et le requin le laissera le plus souvent tranquille. Quand Protea Banks en Afrique du Sud fut au début (vers 1993) un site fréquenté par les seuls pêcheurs sous-marins, ceux-ci se donnaient pour règle d’abandonner aux requins tous les poissons qu’ils n’avaient pas tués nets. Les autres attirant invariablement les requins en se débattant. Aucun accident ne fut alors à déplorer à ma connaissance, même si les requins s’avéraient parfois extrêmement inquisiteurs, puisque tout plongeur était alors pour eux un pêcheur en puissance.

Prélever une proie devant un requin, c’est à mon sens le provoquer et plus le requin concerné sera dominant, moins la provocation sera ignorée.