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28/11/2012

Un requin blanc à La Réunion : c'est possible

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Comme vous le voyez sur cette capture d'écran du shark tracker d'Ocearch, un des 35 requins marqués par l'organisation entre mars et juin, se promène non loin de La Réunion (tout est relatif), en tout cas sous les mêmes latitudes.

C'est donc possible, ce dont certains doutait, mais qui ne m'étonne pas puisqu'on les aperçoit aussi, bien que rarement au Mozambique, en Floride et en Nouvelle-Calédonie. Le mythe du grand blanc dissuadé par l'eau chaude est donc définitivement dissipé.

On nuancera néanmoins le propos. En 6 mois, seulement deux des requins marqués sont remontés plus haut que la frontière du Mozambique et de l'Afrique du Sud.  On comprend donc qu'une rencontre soit encore plus improbable, mais tout aussi possible.

24/12/2011

Sur les récents marquages de requins bouledogue à la Réunion

 

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Le Capitaine Billy Black, fameux pêcheur au gros, préparant le fruit de sa pêche à Walker's Cay, aux Bahamas, qui abrite (abritait?) une impressionnante communauté de requin bouledogues. 2002

 

 

 

 

 

 

Certains d’entre vous ont peut-être suivi les liens postés par Ben concernant les récents marquages à la Réunion (qui étaient apparemment le fait d’initiatives privées), là même où avaient eu lieu certaines attaques. Comme vous l’avez dans ce cas vu, les résultats se sont avérés assez décevants. Un seul requin marqué par la première équipe et un autre par la seconde, au moment où le lien était paru. Ces derniers avaient encore quelques jours devant eux.

J’ai lu ici ou là des remises en cause de l’expérience ou de l’expertise des équipes ayant procédé à ces marquages. Certes, je n’avais personnellement jamais entendu parler de Fred Buyle, l’apnéiste belge qui a procédé au marquage d’un requin avec la première équipe, mais je n’ai pas l’impression que le choix soit particulièrement à remettre en cause. Pour une telle tâche, être un ancien champion d’apnée ne me paraît pas contre-indiqué, les bouledogues appréciant raser le fond ce qui ne les rend pas faciles à approcher.

Le problème ce n’est pas le marqueur, mais la technique de marquage.

De toutes mes plongées avec des requins bouledogues en Afrique du Sud et au Mozambique, je ne les ai jamais vus tourner autour des plongeurs comme le font d’autres requins. La plupart du temps, ils restaient à distance, rasant le fond, si ce n’est peut-être lors de la mise à l’eau où il venaient parfois jeter un rapide coup d’œil avant de repartir aussitôt. Il n’y a guère qu’à Walker’s Cay aux Bahamas que j’ai pu les voir vraiment de près, mais c’était là une situation exceptionnelle. Ils s’étaient habitués à venir à un endroit précis de l’île où l’on vidait les poubelles pleines d’entrailles et d’arêtes des poissons ramenés par les pêcheurs au gros qui fréquentaient cette île. On venait même les nourrir pour divertir le touriste, une à deux fois par semaine. En revanche, cela m’avait intrigué, pas un requin bouledogue lors de mes plongées bouteilles journalières, alors qu’ils étaient parfois une trentaine au bord de l’île. Pas de requin bouledogue non plus lors du shark feeding local (le shark rodeo), fréquenté par les requins gris, les requins des caraïbes et les requins nourrices. Ils ne mangeaient pas de cette soupe. Même chose en Afrique du Sud lors de mes plongées avec les requins tigre d’Aliwal shoal où ceux-ci sont appâtés, même s’ils ne sont pas à proprement parlé nourris. Des blacktips à ne plus pouvoir les compter, parfois jusqu’à 5 ou 6 requins tigres, mais pas de bouledogue. Le requin bouledogue est difficile à approcher en plongée et on ne l’attire pas en surface avec du vinaigre ou de l’huile plutôt.

Dans ces conditions on comprend que le travail des équipes réunionnaises, vue la technique choisie avait peu de chances de réussir.

Les grandes opérations de marquages de requins bouledogue qui ont eu lieu récemment, à savoir celles menées à Sydney Harbour et quelques km au nord en Australie et celle menée sur la Breede River dans la province du cap en Afrique du sud, ont toutes été faites sur des requins qui avaient été au préalable pêchés puis sortit de l’eau. Ceci demande pas mal d’expérience et de moyens puisqu’il faut posséder un harnais permettant de soulever l’animal tout en protégeant sa colonne vertébrale. Ensuite il faut pouvoir le protéger du soleil tout en faisant passer de l’eau dans ses ouïes. Cette opération doit se faire rapidement pour ne pas risquer de remettre à l’eau un animal qui mourra quelques minutes plus tard. Les équipes réunionnaises ont peut être voulu éviter cette technique qui cause certainement beaucoup de stress à l’animal, mais je crains que ce ne soit la seule permettant de mener à bien une étude fiable en marquant un nombre suffisant d’animaux.

Afin de capturer le requin bouledogue, les sud-africains comme nombres d’autres pêcheurs dans le monde utilisent de préférence des appâts vivants. C’est la meilleure garantie avec le requin bouledogue. Les pêcheurs au gros le savent bien qui voient souvent leurs prises sectionnées par les requins bouledogues dans les eaux qu’ils fréquentent. Ceux qui en doutent peuvent aller voir cette vidéo de requins bouledogues attaquant un tarpon en Floride (http://www.youtube.com/watch?v=HCqAafdU09E), il y en plein d’autres sur Youtube. Je vous en recommande également une autre où cette fois-ci c’est en eau douce dans la rivière Breede en RSA qu’un bouledogue découpe une gigantesque carpe. D’ailleurs, c’est dans cette même rivière Breede, je vous le disais qu’on a marqué et suivi une énorme femelle pendant 43h récemment. On a constaté à cette occasion que par moment elle suivait les bateaux de pêcheurs, une fois pendant 35 mn, semblant attendre une prise pour ensuite la dérober.

En conclusion, c’est avec des appâts vivants qu’il faudra peut-être songer à capturer les bouledogues réunionnais une prochaine fois, à condition d’avoir les experts et le matériel adéquats pour les marquer ensuite en dehors de l’eau.

Il me semble qu’il faudrait également envisager des marquages à des périodes différentes de l’année. Les bouledogues migrent parfois d’au moins 200 km au cours d’une année. Il n’est pas dit qu’il n’y est pas à la réunion une population de passage et des périodes de l’année où les bouledogues soient plus nombreux que d’autres. Mais bon, je dis ça, je ne dis rien.

24/11/2011

Quand un requin « attaque » un pêcheur sous-marin

Il y a quelques jours, trop d’ailleurs car j’aurais voulu poster cet article plus tôt, l’un de vous (Ben pour ne pas le nommer), m’a fait parvenir un lien concernant une nouvelle «attaque» de requin à la Réunion. Décidément. Rien à voir avec les précédentes. Géographiquement d’abord, puisqu’elle ne s’est pas produite du tout au même endroit de l’Île que les autres, ensuite parce qu’elle impliquait cette fois un pêcheur sous-marin.

Mais qu’appelle t-on une attaque exactement ? Il semble en effet qu’il s’agisse d’un mot fourre-tout dans lequel on mélange des choses fort différentes. On lui préfère d’ailleurs aujourd’hui bien souvent les termes d’accidents ou même d’incidents.

Une attaque, d’après le Shark Attack Files, est une rencontre avec un requin qui conduit à ce qui est perçu comme une agression (je dis bien « perçu » car bien des morsures sont en fait des morsures d’inspection du point de vue du requin) que le requin morde ou donne un coup. Un requin mordant un pêcheur décrochant un hameçon pris dans ses mâchoires constitue donc une attaque, mais une attaque provoquée.

Car on distingue deux sortes d’attaques : provoquées et non provoquées. C’est là que les choses se compliquent. En fait, seules les secondes correspondent vraiment à l’idée que se fait le grand public d’une attaque : un requin qui attaque sans raison apparente un baigneur. Là où les choses se compliquent, c’est qu’à partir du moment où l’homme n’est pas au menu, il est bien souvent difficile de parler d’attaques non provoquées, dans la mesure où chaque attaque possède toujours une ou plusieurs causes. Démystifier les attaques, choses à laquelle s’attèle souvent ce blog, c’est trouver ces causes.

Je ne reviendrai pas sur le fait que l’homme ne figure pas au menu des requins. Cela me semble évident si l’on rapporte une population de requins au nombre d’attaques qu’elle occasionne. Ainsi, au Cap, en Afrique du Sud, on compte en 2011 trois attaques mortelles occasionnées par des grands blancs pour une population d’environ 1000 individus. C’est très peu et si l’homme est au menu, il doit y jouer le même rôle qu’en cuisine une épice très rarement utilisée.

Provoquées ou non, c’est un peu comme pour les homicides, volontaires ou involontaires. La limite est parfois trouble, comme l’eau, comme l’intérieur d’une conscience qui nous est étrangère.

Quoiqu’il en soit, je pense que l’on devrait classer comme « attaque provoquée » l’attaque d’un requin sur un pêcheur sous-marin. Certes le pêcheur n’agresse pas directement le requin la plupart du temps, mais quoiqu’il en soit il chasse et il est normal qu’il ait à faire avec le maître des lieux, celui qui est au sommet de la chaîne alimentaire et avec lequel il entre directement en compétition même s’il ne le perçoit pas forcément lui-même.

L’attaque d’un pêcheur sous-marin est un combat entre prédateurs du point de vue du requin. Que le plongeur se soumette en abandonnant sa proie au requin et le requin le laissera le plus souvent tranquille. Quand Protea Banks en Afrique du Sud fut au début (vers 1993) un site fréquenté par les seuls pêcheurs sous-marins, ceux-ci se donnaient pour règle d’abandonner aux requins tous les poissons qu’ils n’avaient pas tués nets. Les autres attirant invariablement les requins en se débattant. Aucun accident ne fut alors à déplorer à ma connaissance, même si les requins s’avéraient parfois extrêmement inquisiteurs, puisque tout plongeur était alors pour eux un pêcheur en puissance.

Prélever une proie devant un requin, c’est à mon sens le provoquer et plus le requin concerné sera dominant, moins la provocation sera ignorée. 

26/10/2011

En rond

La semaine dernière, une troisième attaque de grand requin blanc en quelques mois a eu lieu en Australie de l'Ouest . En Australie, pays qui fut après l'Afrique du Sud un des premiers à protéger le grand requin blanc, on propose aujourd'hui (la région de Perth étant moins familière de cette espèce que la Nouvelle Galles du Sud), là encore, de prélever quelques spécimens, au pif, pour satisfaire les électeurs, tout en sachant bien que cela ne sert à rien, mais pour montrer qu'on se bouge.

Une conclusion s'impose. Que ce soit pour les pays a priori en avance dans la connaissance des requins (Australie) ou en retard (France (Réunion) et Seychelles), le naturel chevauche toujours la même Harley Davidson quand il revient au galop.

Il semblerait que nous ayons protégé à l'échelle mondiale le requin blanc sans que nous n'en acceptions  les conséquences. Comme pour le loup. La vérité est que nous voulons éradiquer ces animaux sauvages pour étendre nos prés verts d'ennui. Nous n'acceptons pas leur mode de vie qui se heurte au nôtre. La pratique sécurisée du kite surf est plus importante qu'une espèce toute entière.

Alors même que les effectifs du grand blanc n'augmentent pas en Australie (et diminuent probablement), l'homme fait confiance à ce bon sens, qui se trompe la plupart du temps, pour croire les sportifs aquatiques toujours plus nombreux à le repérer, parce qu'ils sont tout simplement plus nombreux dans l'eau.

Protéger le requin blanc, ce devrait être accepter qu'il y ait des attaques. Sinon, nous continuerons à tourner en rond.

14/10/2011

Un requin "attaque" un kayak à la Réunion

Une cinquième attaque a eu lieu à la Réunion. Mon dernier post avait un peu de retard sur l’actualité. Elle s’est produite le 5 Octobre et a cette fois impliqué un kayakiste. Le requin s'en est pris au kayak sans dommage pour son occupant. Elle s’est produite à peu près là où avait eu lieu la dernière, aux environs du 20 Septembre au cap de la Houssaye, mais aussi et surtout là où un requin bouledogue avait été pêché suite à l’arrêté préfectoral dont je vous parlais dans mon précédent post.

Pas étonnant qu’il y ait des requins dans le coin, vu qu’on a dû appâter en continu pendant trois jours, moins d’une semaine avant. Il aurait été sage de ne pas faire de kayak à cet endroit pendant quelques jours. Je suppose d’ailleurs que c’est la recommandation qu’avaient dû faire les autorités.  Le problème, c’est qu’une fois de plus la réaction primaire va être « plus d’extermination », alors même que c’est probablement le fait de pêcher à cet endroit qui a attiré encore plus de requins. Le poisson se mord la queue, oserais-je dire.

Une remarque : le kayak n’était pas si répandu il y a encore quelques années, le kite surf n’existait pas. Deux pratiques nautiques qui font s’éloigner du bord, par delà les tombants, bien au delà de la où vont les surfeurs. C’est automatique, les rencontres sont plus fréquentes. Alors même qu'il y a sans doute moins de requins.

J’ai entendu dire que les autorités avaient ou allaient entreprendre un balisage des requins de la zone. Apparemment, l’idée serait de suivre leurs déplacements (grâce à des bornes placés sous l’eau) et de savoir ainsi à quel moment fermer les plages. Le balisage est certes intéressant pour étudier les déplacements, je doute qu’un système d’alerte puisse être mis en place (en dehors du fait qu'il faudrait équiper tous les requins et renouveler ces équipements), pour la bonne et simple raison que ce serait sans doute l’alerte permanente. Je vous renvoie à un précédent post et à l’opération de marquage des requins bouledogues à Sydney qui révélait que le jour de la fête nationale, sept bouledogues s’étaient promenés, à proximité des baigneurs à certains moments, sans qu’aucun ne soit même aperçu. Toujours se rappeler qu’on a été vu par bien plus de requins que l’on a vus.

La vraie question est en fait la suivante : pourquoi attaquent-ils à certains moments, alors que tout le reste du temps ils ne le font pas ?

 

 

10/10/2011

10 requins tigres et bouledogues pêchés sur arrêté préfectoral à la Réunion

Il y a de cela quelques jours, l’un de vous (et je l’en remercie vivement) m’a fait parvenir un arrêté préfectoral émanant de la Réunion et autorisant une « opération ciblée de prélèvement de requins ». En gros, la préfecture avertissait qu’elle avait décidé la prise de 10 requins tigres et bouledogue et ce afin de réguler une population de requins "côtiers sédentaires et dangereux" (suite aux quatre attaques mortelles recensées en 2011). Cette régulation par l'homme prête à sourire tant les spécialistes de ces espèces s’accordent à dire combien leurs effectifs ont reculé ces 20 dernières années, en particulier le requin bouledogue, ou requin du Zambèze.

Dans sa très grande rigueur, la préfecture ne donnait pas la répartition des prises entre les espèces. On se demande bien, de toutes façons, comment on en est arrivé à ce nombre de 10, puisque le rapport précise qu’on ne connaît pas la taille des populations de ces deux espèces.  Qui plus est le requin tigre n’est pas sédentaire, même s’il repasse souvent par les mêmes endroits. Quant au requin bouledogue, certes il est un peu plus casanier, mais on le voit quand même souvent faire des migrations de plus de 300 km entre l’Afrique du Sud et le Mozambique. C'est dire la précision du ciblage.

Dernière petit détail : ces prises, était-il précisé, pourraient être faites à l’aide de palangres (ces longues lignes bourrées d’hameçons), technique de pêche qui comme chacun le sait permet une pêche extrêmement sélective.

Cette décision paraît totalement stupide (ne régulant rien du tout), et probablement motivée par de seules raisons électoralistes. Ne pourrait-on plutôt s’inspirer des autorités australiennes qui ont marqué les populations de requins bouledogues dans le port de Sydney. Connaître les déplacements de ces requins réunionnais, pour comprendre ces attaques et leurs circonstances, serait sans doute bien plus intéressant que de les pêcher 

Probablement s’apercevrait-on alors que ces populations n’augmentent pas, qu’elles décroissent au contraire, et que la cause est à chercher du côté d’une autre population, celle des surfeurs, qui passent de longues heures dans l’eau à des endroits fréquentés par les requins, et qui elle n’a cessé d’augmenter depuis l’apparition du surf à la Réunion dans les années 1970-80.

1 attaque mortelle en moyenne chaque année, quatre cette année. Nous restons sur des chiffres très bas comparés à d’autres dangers.

Il faut que les surfeurs acceptent ce risque, comme on accepte le risque de chute dans certains sports extrêmes, fût-elle mortelle, qu’ils oublient qu’il s’agit d’un animal et en particulier du requin avec tout ce que cela excite comme imaginaire.