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06/04/2012

Plus d'attaques, moins de requins

Suite à la récente attaque d'un plongeur sous marin par un grand requin blanc, la quatrième en moins de 7 mois sur la côte ouest de l'australie, fleurissent à nouveau ici et là des reportages et articles sur la hausse du nombre d'attaques de requins dans le monde.

Souvent ces articles se concluent en évoquant le fait que le nombre de pratiquants de sports nautiques est également en augmentation, mais sans plus de précisions, reléguant ainsi au rang d'hypothèse le fait que cette augmentation puisse être la cause de l'augmentation du nombre d'attaques.

Alors que c'est une certitude. On ne devrait pas s'inquiéter du fait que le nombre d'attaque augmente, mais qu'il n'augmente pas plus.

Les principales organisations mondiales forment environ 180000 plongeurs sous marins par an et on estime qu'au final ce sont sans doute plus de 220 000 plongeurs qui sont formés chaque année. Certains d'entre eux doivent poursuivre cette pratique, c'est sûr.

Le nombre de surfers dans le monde atteindrait peut être 27 millions selon la Surf Industry Manufacturer's Association. Ce sport aurait connu une formidable progression au cours des dernières décennies, avec notamment un essor spectaculaire en Europe où il est devenu le symbole d'une cool attitude. Aujourd'hui le marché des équipement liés au surf pèse 13,24 milliards $. Mis à part cette dernière année, il a connu une croissance constante au cours des deux dernières décennies.

Le kite surf qui n'existait pas, si ce n'est de façon confidentielle, jusqu'au début/milieu des années 90, compte aujourd'hui près de 200 000 pratiquants dans le monde.

Le kayaking a également connu récemment un essor surprenant puisqu'on compte pas moins de 8 millions de pratiquants aux US à ce jour, dont nombreux sont ceux qui pratiquent le Kayak en mer ( National Sporting Goods Association).

Alors ça suffit, arrêtons avec les requins dont le nombre augmenteraient ou qui seraient rendus plus agressifs par les opérateurs qui les appâtent. La vérité est que même si le nombre d'attaque en 2011 est élevé, il ne fait qu'égaler les pics constatés au cours des 30 dernières années selon les Shark Attack Files (79 en 2010, 81 en 2000). A peu près le même nombre d'attaques (alors qu'elles sont bien mieux comptabilisées qu'hier) avec tellement plus de monde dans l'eau, cela veut sans aucun doute dire qu'il y a beaucoup moins de requins.

Bientôt, les seuls ailerons que l'on verra sous l'eau seront ceux des planches de surf.

24/11/2011

Quand un requin « attaque » un pêcheur sous-marin

Il y a quelques jours, trop d’ailleurs car j’aurais voulu poster cet article plus tôt, l’un de vous (Ben pour ne pas le nommer), m’a fait parvenir un lien concernant une nouvelle «attaque» de requin à la Réunion. Décidément. Rien à voir avec les précédentes. Géographiquement d’abord, puisqu’elle ne s’est pas produite du tout au même endroit de l’Île que les autres, ensuite parce qu’elle impliquait cette fois un pêcheur sous-marin.

Mais qu’appelle t-on une attaque exactement ? Il semble en effet qu’il s’agisse d’un mot fourre-tout dans lequel on mélange des choses fort différentes. On lui préfère d’ailleurs aujourd’hui bien souvent les termes d’accidents ou même d’incidents.

Une attaque, d’après le Shark Attack Files, est une rencontre avec un requin qui conduit à ce qui est perçu comme une agression (je dis bien « perçu » car bien des morsures sont en fait des morsures d’inspection du point de vue du requin) que le requin morde ou donne un coup. Un requin mordant un pêcheur décrochant un hameçon pris dans ses mâchoires constitue donc une attaque, mais une attaque provoquée.

Car on distingue deux sortes d’attaques : provoquées et non provoquées. C’est là que les choses se compliquent. En fait, seules les secondes correspondent vraiment à l’idée que se fait le grand public d’une attaque : un requin qui attaque sans raison apparente un baigneur. Là où les choses se compliquent, c’est qu’à partir du moment où l’homme n’est pas au menu, il est bien souvent difficile de parler d’attaques non provoquées, dans la mesure où chaque attaque possède toujours une ou plusieurs causes. Démystifier les attaques, choses à laquelle s’attèle souvent ce blog, c’est trouver ces causes.

Je ne reviendrai pas sur le fait que l’homme ne figure pas au menu des requins. Cela me semble évident si l’on rapporte une population de requins au nombre d’attaques qu’elle occasionne. Ainsi, au Cap, en Afrique du Sud, on compte en 2011 trois attaques mortelles occasionnées par des grands blancs pour une population d’environ 1000 individus. C’est très peu et si l’homme est au menu, il doit y jouer le même rôle qu’en cuisine une épice très rarement utilisée.

Provoquées ou non, c’est un peu comme pour les homicides, volontaires ou involontaires. La limite est parfois trouble, comme l’eau, comme l’intérieur d’une conscience qui nous est étrangère.

Quoiqu’il en soit, je pense que l’on devrait classer comme « attaque provoquée » l’attaque d’un requin sur un pêcheur sous-marin. Certes le pêcheur n’agresse pas directement le requin la plupart du temps, mais quoiqu’il en soit il chasse et il est normal qu’il ait à faire avec le maître des lieux, celui qui est au sommet de la chaîne alimentaire et avec lequel il entre directement en compétition même s’il ne le perçoit pas forcément lui-même.

L’attaque d’un pêcheur sous-marin est un combat entre prédateurs du point de vue du requin. Que le plongeur se soumette en abandonnant sa proie au requin et le requin le laissera le plus souvent tranquille. Quand Protea Banks en Afrique du Sud fut au début (vers 1993) un site fréquenté par les seuls pêcheurs sous-marins, ceux-ci se donnaient pour règle d’abandonner aux requins tous les poissons qu’ils n’avaient pas tués nets. Les autres attirant invariablement les requins en se débattant. Aucun accident ne fut alors à déplorer à ma connaissance, même si les requins s’avéraient parfois extrêmement inquisiteurs, puisque tout plongeur était alors pour eux un pêcheur en puissance.

Prélever une proie devant un requin, c’est à mon sens le provoquer et plus le requin concerné sera dominant, moins la provocation sera ignorée. 

28/10/2011

Meilleures plongées avec des requins : N°7, Raggie Cave, Aliwal Shoal, South Africa

Raggie Cave à Aliwal Shoal est sans doute l’endroit du monde (avec le site homonyme de Protea Banks, 70 kms plus au sud, au large de Margate et Shelly Beach) où l’on peut voir le plus de requins taureaux en une seule plongée.

On peut également observer des variantes de cette espèce en Caroline du Nord, en Australie et même au Liban, ai-je entendu dire, mais dans des quantités bien moindre. Le surnom de Raggie vient de Ragged Toothed Shark qui est le nom que les sud africains donnent au requin taureau. En Australie, on l’appelle Grey Nurse Shark et aux Etats Unis Sandtiger shark, mais il s’agit, à chaque fois, à peu près du même requin à la très sale gueule de voyou des mers. Il ne faut jamais se fier à la tête des requins.

Du fait de son faciès peu engageant, ce requin a particulièrement été massacré durant les années 60-70, en Australie notamment, où l’importante population locale fut en partie décimée par les plongeurs amateurs qui découvraient les têtes de harpon explosives.  Il s’agissait pour eux d’un trophée facile qui devait permettre d’en accrocher d’autres (plus féminins), une fois à terre. Les dragueurs à la noix surfent toujours sur des malentendus. Ce requin, dont l’apparence peu engageante ne fait que cacher un caractère assez pacifique, constituait une proie de choix pour ces pêcheurs sous marin voulant faire sensation à leur retour au rivage.

Le résultat est qu’aujourd’hui la population australienne est décimée et peine à récupérer.

On trouve deux principaux endroits de congrégation des requins taureaux à Aliwal Shoal : Raggie Cave et Cathedral. Cathedral est, comme son nom l’indique un peu, une cave qui semble posséder une voûte mais qui possède vraiment une entrée. Raggie cave n’est pas vraiment une cave, juste une succession de perforations larges dans le récif. Un couloir.

Quand nous montâmes dans le zodiac par ce joli matin de Novembre 2001 sud-africain, tout craignait du point de vue du sens commun, la pluie et les vagues, notamment. La compagnie n’était pas terrible, non plus (4 amerloques dogmatiquement obsédés de sécurité et ouverts comme des huîtres).

Après avoir poussé le volumineux zodiac à l’eau, après que, ne voulant pas démarrer, il nous ait bien imprégnés de vapeurs de kérosène matinales, les américains  vomirent à peu près tous pendant les 5 kms qui devaient nous conduire au site de plongée. Les poissons volants que nous croisâmes et qui, comme le souligne Audiard, ne constituent pas la majeure partie de l’espèce, n’en revenaient pas.

Nous aperçûmes également deux ou trois dauphins sur le chemin et, à une centaine de mètres, une baleine à bosse. En Novembre, les baleines redescendent du Nord. Peu importe.

Un rayon de soleil se pointa et nous stopâmes. Quelques secondes de calme sur l’océan indien que n’interrompit qu’une forme noire, ondulée comme une nappe, sautant hors de l’eau. Il s’agissait en fait d’une raie aigle.

L’américaine demanda au skipper « C’était quoi ? Un morceau de plastique ? »

Le skipper sud africain lui répondit que bien sûr, il y a avait des gros morceaux de plastique qui flottaient au dessus de l’eau partout en Afrique. Tout doux.

Nous n’êumes pas le temps de creuser le sujet car un espadon bondit hors de l’eau, la queue en godille sur 1m ou 2 avant de replonger. Il était petit. Pas plus d’1m50, plutôt moins. L’américaine ne le confondit pas avec marteau-piqueur.

La seconde après, de l’autre côté du zodiac un plongeur pointa à son doigt vers la surface. « Là, un requin ! » Je mis quelques secondes à localiser le sujet de cette agitation. A une vingtaine de mètre, un aileron dépassait de la surface dans le plus pur style hollywoodien. Il s’agissait d’un aileron de requin marteau hallicorne qui s’approcha de nous avant de repartir sous l’eau.

Il était grand temps de plonger à notre tour. Après toutes ces distractions, le zodiac redémarra pour se positionner à la verticale du point de plongée et nous plongeâmes en flottabilité négative. Regroupement à 3m et nous continuâmes jusqu’en bas, jusqu’à 18m.

L’eau était bleue verte, remplie de particules flottantes, mais finalement assez claire. Une houle décidait du rythme de nos mouvements. Très vite, une fois en bas, on réalisait vite qu’on était sur le chemin d’une requin taureau, venu de nulle part, et qu’il fallait laisser passer. Les requins semblaient se laisser promener par la houle et se contentaient d’un léger battement de queue au bon moment pour aller dans le sens qu’ils souhaitaient. Ils avaient l’air léthargiques. Il paraît que les requins taureaux récupèrent durant le jour des accouplements nocturne pendant cette période à Aliwal. Ils montent en hiver vers Sodwana, Cape Vidal et le Mozambique, pour redescendre vers le cap avec une escale à Aliwal au retour. On y voit fréquemment de grandes femelles (3 ou 4m pour les plus grandes) le derrière de la dorsale lacéré par l’accouplement.

Le couloir de Raggie Cave est fait de sable. Les requins taureaux aiment le survoler. C’est aussi là qu’on peut trouver les dents qu’ils perdent souvent lors de leurs accouplements. Le truc alors, c’était de laisser filer son air et de se poster à plat ventre en attendant qu’un raggie passe juste au dessus de vous. C’est ainsi qu’on obtient les meilleurs angles de caméra. Ce jour-là, j’en vis tourner autour de moi plus d’une quinzaine. L'un chassait l'autre, l'autre découvrait l'un. Ils se déplaçaient comme une farandole de fantômes hypnotisés. La bouche entrouverte en permanence, ils filtraient l'eau en l'absence de toute langue.

Je remontais au bout de quarante cinq minutes passées face à face avec ces requins aux dents qui leur sortent de la bouche. J'étais émerveillé. Pourtant cette congrégation n'avait rien d'exceptionnel. Il est arrivé qu'on voit une centaine de requins taureaux en une plongée à Aliwal.
Je les avais surpris durant leur sieste. J’avais remarqué cette particularité qu’ils ont de prendre l’air à la surface pour se donner une flottabilité neutre et errer somnolant au dessus du récif. J'étais content. Arrivé à la surface, des requins plein les yeux, je retrouvais la jeune américaine du début.

Nous nous hissâmes sur le zodiac, elle enleva son masque et me demanda immédiatement : « Did ya see that turdle ?? », mais je ne l'entendis pas.

26/10/2011

En rond

La semaine dernière, une troisième attaque de grand requin blanc en quelques mois a eu lieu en Australie de l'Ouest . En Australie, pays qui fut après l'Afrique du Sud un des premiers à protéger le grand requin blanc, on propose aujourd'hui (la région de Perth étant moins familière de cette espèce que la Nouvelle Galles du Sud), là encore, de prélever quelques spécimens, au pif, pour satisfaire les électeurs, tout en sachant bien que cela ne sert à rien, mais pour montrer qu'on se bouge.

Une conclusion s'impose. Que ce soit pour les pays a priori en avance dans la connaissance des requins (Australie) ou en retard (France (Réunion) et Seychelles), le naturel chevauche toujours la même Harley Davidson quand il revient au galop.

Il semblerait que nous ayons protégé à l'échelle mondiale le requin blanc sans que nous n'en acceptions  les conséquences. Comme pour le loup. La vérité est que nous voulons éradiquer ces animaux sauvages pour étendre nos prés verts d'ennui. Nous n'acceptons pas leur mode de vie qui se heurte au nôtre. La pratique sécurisée du kite surf est plus importante qu'une espèce toute entière.

Alors même que les effectifs du grand blanc n'augmentent pas en Australie (et diminuent probablement), l'homme fait confiance à ce bon sens, qui se trompe la plupart du temps, pour croire les sportifs aquatiques toujours plus nombreux à le repérer, parce qu'ils sont tout simplement plus nombreux dans l'eau.

Protéger le requin blanc, ce devrait être accepter qu'il y ait des attaques. Sinon, nous continuerons à tourner en rond.

19/10/2011

Pisciculture

Un ami m'a fait parvenir cette bien jolie série de requins spriripicturaux

 

Capture d’écran 2011-10-19 à 11.45.33.png

 

 

 

 

 

Pour voir le reste, suivre ce lien : http://spokeart.viewbook.com/album/sinkorswim#22

14/10/2011

Un requin "attaque" un kayak à la Réunion

Une cinquième attaque a eu lieu à la Réunion. Mon dernier post avait un peu de retard sur l’actualité. Elle s’est produite le 5 Octobre et a cette fois impliqué un kayakiste. Le requin s'en est pris au kayak sans dommage pour son occupant. Elle s’est produite à peu près là où avait eu lieu la dernière, aux environs du 20 Septembre au cap de la Houssaye, mais aussi et surtout là où un requin bouledogue avait été pêché suite à l’arrêté préfectoral dont je vous parlais dans mon précédent post.

Pas étonnant qu’il y ait des requins dans le coin, vu qu’on a dû appâter en continu pendant trois jours, moins d’une semaine avant. Il aurait été sage de ne pas faire de kayak à cet endroit pendant quelques jours. Je suppose d’ailleurs que c’est la recommandation qu’avaient dû faire les autorités.  Le problème, c’est qu’une fois de plus la réaction primaire va être « plus d’extermination », alors même que c’est probablement le fait de pêcher à cet endroit qui a attiré encore plus de requins. Le poisson se mord la queue, oserais-je dire.

Une remarque : le kayak n’était pas si répandu il y a encore quelques années, le kite surf n’existait pas. Deux pratiques nautiques qui font s’éloigner du bord, par delà les tombants, bien au delà de la où vont les surfeurs. C’est automatique, les rencontres sont plus fréquentes. Alors même qu'il y a sans doute moins de requins.

J’ai entendu dire que les autorités avaient ou allaient entreprendre un balisage des requins de la zone. Apparemment, l’idée serait de suivre leurs déplacements (grâce à des bornes placés sous l’eau) et de savoir ainsi à quel moment fermer les plages. Le balisage est certes intéressant pour étudier les déplacements, je doute qu’un système d’alerte puisse être mis en place (en dehors du fait qu'il faudrait équiper tous les requins et renouveler ces équipements), pour la bonne et simple raison que ce serait sans doute l’alerte permanente. Je vous renvoie à un précédent post et à l’opération de marquage des requins bouledogues à Sydney qui révélait que le jour de la fête nationale, sept bouledogues s’étaient promenés, à proximité des baigneurs à certains moments, sans qu’aucun ne soit même aperçu. Toujours se rappeler qu’on a été vu par bien plus de requins que l’on a vus.

La vraie question est en fait la suivante : pourquoi attaquent-ils à certains moments, alors que tout le reste du temps ils ne le font pas ?

 

 

21/08/2011

Quels sont les requins responsables des attaques aux Seychelles?

En quinze jours deux personnes ont été attaqués et tués par des requins à Praslin aux Seychelles. Jeremy Cliff du Natal Sharks Board a conclu avec une certitude de 100% qu’il s’agissait pour la seconde attaque d’un requin blanc.  Les marques de dents portent sa signature et on a même retrouvé les restes disloqués d’une dent dans le corps du malheureux baigneur.

Le débat, ces jours derniers, voyait s’affronter les partisans du requin bouledogue et ceux du requin tigre. Le grand blanc a mis tout le monde d’accord et apparemment rassuré certains qu’il ne s’agissait que d’un requin de passage (c’est bien connu, le Mal est toujours extérieur), même si d’autres sont persuadés que ce requin attaque lors des marées qui suivent la pleine lune (lune de miel pour la victime, pleine lune pour le requin, tout se recoupe) et qu’il devrait faire une nouvelle apparition meurtrière le 29 août ( !!!!). Les Quint locaux se préparent pour ce rendez vous durant lequel ils n’attraperont évidemment pas le coupable, mais qui sera sans doute l’occasion de massacrer quelques spécimens d’autres espèces totalement innocentes qui passeront par là. C'est bien connu, quand un larcin est commis à Sarcelles par un individu de type asiatique, on a toutes les chances de trouver le coupable en arrêtant un japonais place de l'Etoile.

Il est désolant de constater, une fois de plus, que 25 ans après les dents de la mer, nous n’avons guère évolué. Tout d’abord pourquoi s’agirait-il d’un seul requin ou même d’un seule espèce ? Les attaques dans le New Jersey en 1916 qui ont inspiré les dents de la mer étaient elles-mêmes sans doute le fait d’au moins deux espèces (le grand blanc et le requin bouledogue). Pourquoi n’aurions-nous ici affaire qu’au seul grand requin blanc ? On a déjà vu dans cette partie de l’océan indien, des requins blancs et des requins tigres s’inviter à la même table pour dépecer une carcasse de baleine.

Je pencherais personnellement, même si le jeu des devinettes est ridicule, pour une combinaison de tigre et de blanc. Le requin bouledogue (ou requin du zambèze dans cette région) est une espèce relativement territorial (ou plutôt qui possède un territoire beaucoup plus petit). Sa présence dans ce cas aurait une signification beaucoup plus profonde que celle du blanc ou du tigre, requins maraudeurs qui avalent des milliers de kilomètres et qui n’hésitent pas à dévier de leur itinéraire habituel et faire un petit crochet pour un bon repas.

S’il s’agit du tigre et du blanc, ils ne devraient pas rester longtemps sur place. Pour les tigres, il me semble que c’est environ quinze jours, pour les blancs une semaine. Je me base sur les observations faites par les opérateurs en Afrique du sud avec les grands blancs de Dyer Island ou les tigres d’Aliwal Shoal. Les mêmes individus reviennent au cours de l’année, mais à chaque fois font des séjours sur place de ces durées respectives, si je me souviens bien. Dans ce cas, si c’est l’opportunité qui les a amenés, il faut juste s’assurer que la source de nourriture est bien tarie, car sinon, ce qui pourrait se produire, c’est que d’autres requins soient attirés (ce qui a d’ailleurs dû déjà se produire, car j’ai du mal à croire que le même requin aient pu attaquer deux fois, même si c’est techniquement possible). En attendant, j’éviterais personnellement de me baigner à cet endroit avant que l’affaire ne soit tirée au clair et qu’au moins 2 à 3 semaines soient passées. Ou plutôt non, j'irais vite voir avec une bouteille sur le dos.

08/12/2010

La protection des requins à Malpelo

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Le Nemo, amarré à un navire de la marine colombienne à Malpelo, Novembre 2010.

 

 

 

Malpelo, située en plein Pacifique, à 500 km de la côte colombienne, est un sanctuaire pour les requins, notamment pour les requins marteaux et les requins soyeux que l’on trouve autour de l’île regroupés en bancs de plusieurs dizaines, voire centaines d’individus. C’est la concentration plus que la rareté des espèces qui en fait un endroit unique, à la notable exception d’une variété endémique de requin féroce découverte récemment.

 

 

Malpelo qui s’élève d’environ 300 m au dessus de l’eau pour l’îlot principal, constitue la crête émergée d’une montagne sous marine, la dorsale de Malpelo. Alors que la surface de l’île n’est que 3,5km2, la dorsale s’étend elle sur 296 km de long et 90 km de large. C’est dire que la surface à protéger dépasse de loin la superficie de l’île. C’est pour cela que la zone du Sanctuaire de Faune et de Flore de Malpelo a évolué en trois étapes pour atteindre sa taille actuelle qui couvre un périmètre 90 km sur 90 km et semble enfin à peu près suffisante.

 

L’espèce ciblée par la pêche à Malpelo, c’est le requin, même si d’autres espèces comme le thon sont présentes en abondance. Elles peuvent être pêchées ailleurs, avec moins de risques. Tandis que rares sont les endroits où les requins se concentrent comme autour de cette île qui est une oasis dans un désert d’eau. Ils ne s’en éloignent que d’une quarantaine de kms maximum pour se nourrir, avant de revenir autour de l’île se faire nettoyer.

 

Reste que ce sont des pélagiques et qu’ils transitent. Il y a une inter-connectivité entre Malpelo et ces autres îles que sont les Galapagos en Equateur, Cocos au Costa Rica et Coïba au Panama. Des requins marteaux marqués à Malpelo ont été retrouvés autour de chacune de ces îles. Les tortues marines, les mammifères marins et d’autres pélagiques utilisent également ces itinéraires bleus entre ces montagnes sous marine qu’on appelle corridors marins. Les pays concernés par ces migrations se sont rejoints pour créer le CMAR, un corridor marin protégé reliant ces îles. Ces initiatives semblent néanmoins en réalité encore balbutiante, faute de moyens de surveillance.

 

 

La Colombie, parmi les pays cités, paraît de loin être la plus volontaire. Pour les autres, les choses sont plus problématiques. Le Panama, dont la complaisance maritime n’est plus à prouver, abrite sous son pavillon de nombreux pêcheurs illégaux. Quant au Costa Rica, qui faillit sortir du CMAR il y a peu suite aux pressions de lobbies de pêcheurs, sous des apparences fermes, on le découvre très laxiste : le respect des zones protégées laisse pour le moins à désirer, que ce soit du fait du manque de capacité à le faire respecter ou de la corruption. On m’a informé ainsi que des taupes de la marine costa-ricienne renseignaient régulièrement les pêcheurs commandités par les cartels taïwanais sur la présence des navires de contrôles. Quand on sait que de son côté l’Equateur soutient encore régulièrement le Japon dans sa lutte pour l’obtention de quotas supplémentaires de pêche à la baleine, on se dit que la partie est loin d’être gagnée.

 

Lors de mon séjour a Malpelo, nous étions amarrés à un navire de la marine colombienne en permanence (les endroits de mouillages ne sont pas légion). Un autre navire parcourait la zone dans le même temps. Je ne l’ai jamais aperçu. L’un de nos guides m’informa que c’était la première fois qu’il constatait une présence militaire en cinq voyages en 2010.

 

Selon la fondation Malpelo, au cours des 7 dernières années, le nombre de prises illégales de requins aurait diminué de 80%. Il s’élevait à environ 13 tonnes aux alentours de 2003, ce qui représentait environ 65 000 requins tués. Je ne sais pas sur quelles bases ces mesures reposent, mais il est par définition toujours difficile de juger de l’ampleur d’un commerce qui se déroule dans l’ombre. Lors de mon séjour sur l’île, nous avons quand même trouvé 2 ou trois morceaux de lignes et de filets montés sur des bouées.  Les pêcheurs sont donc bien là, à jouer plus ou moins à cache-cache avec des militaires fort mal équipés. Leurs bateaux sont des rafiots lents et peu dissuasifs. Souvent, faute d’avoir pu arraisonner les vaisseaux coupables, ils doivent se contenter de rapporter leur immatriculation aux autorités compétentes de leurs pays respectifs. Autant dire que pour certains, le risque est faible voire inexistant.

 

Ce trafic, dérisoire à l’échelle mondiale, bien que beaucoup moins juteux que le trafic de la drogue, n’est pas négligeable à l’échelle de pays comme la Colombie et ses voisins.

 

La Colombie qui a combattu bien d’autres formes de criminalité ces dernières années semble s’être attaqué à celle-là. Il lui revient de s’assurer qu’en contrepartie, elle saura dégager des revenus de substitution qui combleront le manque à gagner et qui encourageront dans cette voie. A cet égard, Malpelo pourrait facilement accueillir 3 bateaux de plongeurs à la fois, sans que la vie marine n’en soit bouleversée, ni que les plongeurs ne se croisent sous l’eau. Ils pourraient même échanger des infos intéressantes sur les sites de plongée. Un éco-tourisme profitable pour tous serait peut-être un argument convaincant, même s’il ne peut être qu’une réponse partielle au désarroi économique que connaissent les régions côtières qui se sentent en manque quand la drogue ou la rébellion n’arrondissent pas leurs fins de mois. 

 

10/06/2010

le requin remord

Les dents des requins sont extrêmement infectieuses, pour la seule et unique raison qu’ils ne les lavent presque jamais.

Même ceux aux longs ailerons, aux grandes dents, même les petits grands blancs, même après le déjeuner. Même ceux qui n’ont plus de dents...

 

.... ou qui n’ont que leurs oreilles pour pleurer.

30/07/2009

sharks and symbolism

“There isn't any symbolism. The sea is the sea. The old man is an old man. The boy is a boy and the fish is a fish. The shark are all sharks no better and no worse. All the symbolism that people say is shit. What goes beyond is what you see beyond when you know.”

 

Ernest Hemingway

27/07/2009

Plus vite qu'un requin

"Il n'est pas nécessaire de savoir nager plus vite qu'un requin, il suffit de savoir nager plus vite que la personne qui se baigne avec vous."

 

Kevin Nilon

03/06/2009

Accident waiting to happen

C’est la formule qu’utilisent les anglo-saxons pour qualifier un certain type d’activité dont la fin tragique n’est que trop prévisible. Il y a quelques temps, mois, années peut être, dans un article intitulé « la réputation du longimanus est-elle justifiée ?», j’avais décrit les comportements stupides et dangereux auxquels se vouaient certains plongeurs en croisière en mer rouge avec la bénédiction de certains opérateurs . Ce qui devait arrivé est arrivé : une femme a été tuée ces derniers jours par un requin au sud de la mer rouge lors d’une de ces croisières.

 

Quand pour la première fois, je vis en 2003 des longimanus aux Brothers, un des guides de plongée me montra des clichés pris à Elphinstone de ces mêmes requins chargeant les plongeurs. Le guide admit que pour obtenir ces clichés il avait du appâter les requins  au moyen de carcasses de poulets. Deux ans plus tard, à Elphinstone, je vis des touristes jeter de la nourriture aux longimanus depuis un bateau. Quand je leur criai d’arrêter, ils réagirent comme face à un mauvais coucheur.

 

J’ai vu ce requin plusieurs fois en mer rouge. Elphinstone, les Brothers, Daedalus et Habili Ali. Je suppose que c’est sur l’un de ses sites que l’attaque a eu lieu. Le communiqué parle d’un récif au sud de Marsa Alam, donc a priori pas Elphinstone, mais allez savoir avec les communiqués. Pas sûr non plus qu’il s’agisse d’un longimanus, le communiqué ne le précise pas. Il pourrait tout aussi bien s’agir d’un requin soyeux, mais bon, je mettrais quasiment ma main à couper, façon de parler, que c’était bien lui. L’aileron blanc du large.

 

Penser que l’on puisse nourrir un longimanus à la main en snorkeling comme cela semble avoir été le cas semble totalement délirant pour celui qui connaît un peu les requins. Cousteau désignait ce requin comme le plus dangereux à son sens. C’était très exagéré, mais de là à le confondre avec un caniche, il y a un grand pas que je ne sauterais pas. Il n’attaque certes pas beaucoup plus souvent que le caniche, mais la morsure est un peu plus dangereuse, surtout quand on se trouve en pleine mer dans un pays qui ne dispose pas d’hélicoptères de secours.

 

Ce qui me désole le plus dans cette histoire, c’est le comportement des opérateurs. Que les touristes ne mesurent pas les dangers que peut présenter cette espèce une fois excitée est une chose, mais que ceux qui le savent ne les préviennent pas en est une autre. D’autant plus que d’autres incidents s’étaient déjà produits, soigneusement cachés au grand public.

 

Le requin océanique est un requin du large, à l’affût de la moindre opportunité. Il défie souvent les plongeurs avant de s’éloigner. Il les teste, sait-on jamais. Je l’ai vu attaquer les parachutes oranges montant vers la surface de plongeurs au palier. C’est le plus beau requin qu’il m’ait été donné de voir. Mettez de la nourriture dans l’eau (n’importe comment de surcroît), vous en ferez malgré lui un tueur potentiel.

20/05/2009

Le requin transactionnel

Il existe un requin très agressif et méconnu, le requin transactionnel.

Il pense ne pas aimer mordre, mais ne peut pourtant s’en empêcher. Son aileron dorsal penche à droite. Certains disent qu’il est en berne, d’autres ne le remarquent pas.

 

Requin du large, une irrésistible envie le pousse pourtant vers le bord. Attiré par les jambes de belles nageuses, il ne peut s’empêcher de s’en approcher.

 

Pourtant à chaque fois qu’il mord, il se sent irrémédiablement pris de remords et se met à perdre du sang, comme s’il se le reprochait.

 

De chacun de ses ailerons s’échappe un large filet rouge que d’aucuns qualifieraient de saignement à flots.

 

C’est alors que le requin transactionnel finit par mériter son nom. Il prend soudain conscience que c’est finalement lui-même qu’il a mordu, que c’est lui même qui saigne et que c’est lui même qui tôt ou tard devra se sauver vers le large.

 

On devrait interdire les jeux aux requins qui ne pensent qu'à eux-mêmes.

 

07/08/2008

Une petite dépêche

Je ne sais pas si'il arrive à certains d'entres vous de regarder "Shark Week", chaque année sur Discovery (vous pouvez charger certains films sur itunes store), mais le dernier cru est particulièrement décevant : enfoncement de porte ouvertes par des américains musclés et hystériques, expérimentalo-sensationalisme béat, rotation indéfinie du sens, sont les ingrédients qui ne vous emmènent nul part. On n'apprend rien. Comme si les requins s'étaient refermés à double tour.

Mon article sur le fait de tourner en rond n'était donc pas déplacé. Quoi de neuf? Il se passe des choses certes, mais pas de quoi faire un article et encore moins un documentaire. Que vous dire?

Que les requins baleines crâment leur fuel en profondeur, que les tigres ne sont pas fiables même apprivoisés, que le sardine run se manifeste toujours mais plus bas? Pas de quoi se lever la nuit.

Pour le reste il faudra innover. Trouver d'autres manières de filmer. Inventer pour observer du nouveau,
sous l'eau.

Si ça continue, je vais encore me répéter en anglais.

17/07/2008

Au courant

La Sharkuterie était fermée le mois dernier. Apparemment, certains d’entre vous étaient au courant. Je le sais car j’ai les empreintes digitales (mais anonymes) de tous ceux qui sont passés. Vous n’étiez pas très nombreux.

Pour reprendre les choses là où nous les avions laissées, voici un petit film concocté avec des amis du bureau.

Promis, les prochains posts seront plus spécifiquement requinesques.