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14/09/2012

Les déplacements de la population de grands requins blancs sud africaine : premières observations à partir du Shark Tracker Ocearch

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                                               Maureen, le 14/09/2012

 

Il y a de cela quelques temps, je vous parlais du Shark Tracker lancé par Ocearch, plus connus comme les sharkmen de National Gegraphic, inventeurs de la première émission de télé réalité requinesque.

Mais tout d'abord, Je voudrais attirer votre attention sur quelques limites du Shark Tracker, peut être inhérente à l'idée même de data visualisation qui se fait si bien passer pour la réalité. Il ne faut jamais oublier que la data visualisation est et restera toujours une forme d'interprétation des data, parfois trompeuse.

Je m'explique. On peut visualiser grâce aux Shark Tracker ce qui se fait passer pour l'itinéraire d'un requin, représenté par des segment reliant chacun des Ping de celui-ci (le ping est le moment/point où son aileron fend la surface et permet au transmetteur qui a été fixé dessus de le localiser, pour peu qu'un satellite se balade pas trop loin de là au même moment ). Or il y a bien souvent des intervalles de plus d'un mois, entre deux ping ! Parfois on s'en rend compte parce qu'en un mois le requin s'est énormément dépacé, d'autres pas, car le ping suivant, bien que très éloigné dans le temps est très proche dans l'espace.

Entre deux ping espacés d'un mois, le requin a dû faire bien des aller et venues non linéaire et autres divagations que le tracker ne perçoit pas. (Le problème avec les requins c'est qu'il n'ont pas forcément besoin d'aller à la surface pour respirer).  Peut être voyage t-il énormément entre deux ping espacés dans le temps, mais reste en profondeur. Qu'y fait-il ? Peut être se met -il en mode charognard pour rechercher les carcasses de cétacés morts (Ne l'a t-on pas observé à Hawaï à plus de 450m de fond!) ? Entre autre.

Une autre observation. Ce sont les femelles qui font les plus longs périples. En effet, cinq individus sur 34 à ce jour on fait des périples les éloignant de plus de 800 km des côtes. Il s'agit de cinq femelles. On constate une grande variété de destinations dans ces périples. L'une a remonté la côte atlantique jusqu'en Namibie, l'autre est allée se promener au Mozambique puis à Madagascar et se trouve maintenant a quasi équidistance de sa position de départ en Afrique du Sud et de l'Australie (sa dernière position qui d'aujourd'hui, alors qu'elle était silencieuse depuis le 13 août ! Si ça c'est pas de l'info frâiche !). Ira t-elle jusqu'en Australie, comme Nicole il y a 6 ans (encore une femelle cf. article  du 13/04/2006 Et si Nicole était amoureuse ?). Une troisième est partie se promener loin dans les mers froides du sud avant de retourner sur la côte sud africaine. 

A l'heure où je vous parle, une quatrième femelle trace également sa route vers le sud. Voyons si elle ira plus loin que la précédente.

Pourquoi une telle diversité dans ces périples. ? La nourriture recherchée y est sans doute pour quelque chose. On sait que les baleines à bosse viennent mettre bas dans les mers chaude durant l'hiver austral. Madagascar est à ce titre une terre d'accueil pour ces dernières. On sait également que deux fois par an, les thons se rassemblent au large du cap Agulhas et du cap de Bonne Espérance (les pêcheurs sud africains, japonais et taîwanais le savent hélas mieux que quiconque). La côte namibienne est tristement célèbre pour ces colonies de phoque dont quelques 91000 sont massacrés chaque année de juillet à novembre, car c'est la saison des petits qui représentent plus de 90% des  victimes (tiens donc, c'est peut être cela qui intéresse également les requins).

Baleines, phoques, thons, trois proies en tête de menu pour le grand requin blanc,. Trois itinéraires correspondants ? Sans doute pas exclusivement.  Les mers au sud du continent africain sont également riches en calamars et les baleines les fréquentent également. Sans compter les nombreux bancs de dauphins (notamment communs) que le requin blanc affectionne également.

Pourquoi si peu de trajets longue distance ? Je pense que cela tient aux zones de marquages elles-mêmes. Les plus gros spécimens femelles par le fait même qu'ils vadrouillent sont proprotionnellement moins présents sur les grands points de rassemblement en bord de côte que sont False, Bay, Gansbaai, Mossel Bay et Algoa Bay. Donc plus difficile à marquer. L'échelon que nous possédons n'est probalement représentatif que de cette zone.

Les males en revanche ne s'éloignent guère de la côte. Leurs besoins alimentaires ne le nécessitent peut être pas ? Peut-être sont ce seulement les femelles porteuses qui voyagent le plus ?

Une dernière remarque. A ce jour, on n'observe pas en Afrique australe de phénomènes semblables à ceux observés dans le Pacifique Est où les requins blancs mâles se retiraient au large en un endroit baptisé le "shark café" que les femelles (qui elles poussent parfois jusqu'à Hawaï) visitent de temps en temps. Il semblerait qu'en Afrique du Sud, tout se passe non loin de la côte, mais ne nous prononçons pas trop vite, le shark tracker n'est en service que depuis fin mars.

Toute ces réserves ayant été posées, je retire ce que j'avais dit dans mon précédent post où j'ironisais sur l'appli permettant de repérer les requins en temps réel (d'ailleurs elle existe déjà aux US !). Le shark tracker, c'est quand même génial. ! A bientôt pour d'autres observations, sur les traces de Maureen (la femelle qui s'est localisée en plein milieu de l'océan indien ce jour même même) ... notamment.

01/01/2012

Y a t-il un courant froid qui rend possible le Sardine run?

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"En évitant un prédateur, les sardines se mettent à portée d’un autre : l’homme."

 



En ce début d’année, que je ne vous souhaite pas trop degradée, j’ai décidé de faire un petit article un peu moins requinesque sur le courant froid qui remonterait en Afrique du Sud de la côte Est de la province du Cap jusqu’au Kwazulu Natal et provoquerait la migration annuelle des sardines, appelée Sardine Run. Migration dont bénéficieront notamment les requins taureaux, les requins sombres et les requins cuivres. Les requins ne sont donc pas totalement absents de ce post.

Je regardais hier un épisode de la série de documentaires de la BBC “Great events” consacré au Sardine Run et je constatais qu’on n’avait guère évolué depuis 2009 sur l’explication de ce phénomène. Les mêmes erreurs perdurent.

L’explication que donne la BBC, emboîtant le pas de certains "scientifiques", serait qu’un courant froid venu du Cap remonterait le long de la côte, comme une langue de froid, dans le sens inverse du courant .

J’aimerais faire à ce sujet une ou deux observations factuelles. J’ai assisté au Sardine Run en 2005 , j’ai plongé de nombreuses fois avec les spécialistes locaux du Run qu’il s’agisse d’opérateurs de plongée, de photographes de passionnés ou même de scientifiques.

Un premier fait m’interpelle : un opérateur de plongée local, ancien du sharks board, m’a dit qu’il n’avait jamais observé, en tout cas de la South Coast du Natal jusqu’au Nord du Transkei, un courant remontant vers le nord. Le courant va toujours invariablement dans le meme sens en direction du sud ouest. C’est le courant qu’on appelle le courant des Aiguilles (Agulhas current), du nom de Cape Agulhas, le point le plus au sud du continent africain.

Certains se demanderont alors comment font les sardines pour remonter à contre-courant. La réponse à mon avis est qu’elle n’avancent que les jours où le courant est le moins fort.  En effet, les jours où j’ai pu observer des baitballs en mer, ou meme des poches des sardines depuis la plage, le courant était relativement clément.

Une chose est vraie néanmoins : il faut que la temperature de l’eau descende en dessous de 20°c, 19°c très exactement pour que les sardines apparaissent.

Je suis  sorti en mer tous les matins de 7 heures à 2 heures de l’après midi pendant deux semaines. La première semaine, la temperature de l’eau oscillait entre 22 et 23°c. Pas une sardine. C’est seulement quand la temperature est tombée à 19°c que les poches sont apparues. D’après les spécialistes locaux, elles resteraient au large, en profondeur quand la temperature du bord est trop chaude. Quoiqu’il en soit, quand la temperature a atteint les 19°c et que les baiballs ont commence à fleurir (3 en 2 jours), pas de trace d’un courant remontant le long de la côte.

Si les sardines s’approchent de la côte, c’est donc peut être pour une autre raison. Je ne sais laquelle. Est-ce par ce que la côte leur semble un meilleur endroit pour se protéger de certains prédateurs, les requins et les dauphins notamment qui en s’approchant du bord courent le risque de s’échouer (risque que certains prennent, parfois à leurs propres depens cf. http://www.youtube.com/watch?v=2BX-F5iVdk8)? Si c’est le cas les sardines ne sont pas bien inspirées. En évitant un prédateur, elles se mettent à portée d’un autre : l’homme.

Du coup, l’explication la plus plausible me paraît là encore être le courant des aiguilles, venant en sens inverse de leur progression. Peut être est-ce en longeant la côte qu’elles s’en protègent le mieux, comme le font des plongeurs qui se collent à un récif pour se protéger?

Ainsi, lors du Sardine Run, ll n'y aurait donc pas de courant qui remonterait vers le Nord, juste des sardines qui remonteraient à contre-courant en rasant les murs.

 

 

 

 

 

07/07/2009

Les absences du requin pèlerin

Le requin pèlerin doit son qualificatif aux premières observations répertoriées qui se basaient sur les apparitions saisonnières de cet animal de passage ; passage qui finit par s’installer pour devenir son essence, avec une certaine connotation religieuse qui ne vous aura pas échappé. Le requin pèlerin est en effet un requin en pèlerinage. On supposait alors, bien entendu, que l’objet de ce pèlerinage était nos côtes qu’il visitait en été. Personne ne connaissait alors les Maldives, qu’il ne visite d’ailleurs jamais..

Ce qu’il faisait le reste de l’année, notamment pendant les longs mois d’hiver, fut longtemps sujet à conjectures. Nombreux furent ceux qui tentèrent ou furent tentés par la thèse de l’hibernation. Il faut dire que la saison s’y prêtait.

Rien ne confirmait, ni n’infirmait leurs dires, si ce n’étaient les disparitions fantomatiques de l’animal. Ses absences à répétition. Il devait partir vers le bas, mais qu’y faisait-il au juste et où. ? On l’imaginait un peu plus loin et beaucoup plus profond. Plus tard on imagina qu’il suivait le plancton en des régions marines isolées.

Aujourd’hui, le doute a de moins en moins de place. Tous les ballons sont crevés et presque tous les mystères sont percés. Les bateaux disparus aux Bermudes sont sortis d’une brume liquide grâce aux sonars et autres voyeurs aveugles des fonds. Il était donc normal que tôt ou tard l’hibernation des requins pèlerins refasse surface.

C’est chose faite depuis peu. On a enfin réussi à marquer le requin pèlerin avec de petits enregistreurs de données qui tiennent suffisamment de temps accrochés à l’animal pour suivre ses moindres mouvements. C’est tout récent. Ca date d’il y a à peine un an.

Et qu’a t-on découvert au juste de bien intéressant? Que le requin pèlerin se livre à un long pèlerinage circulaire, qu’il tourne en rond comme sied à son espèce. Il tourne inversement au sens des aiguilles d’une montre, emporté dans le tambour de la machine à laver du Gulf Stream.

Où passe t-il l’hiver nordique ? Au sud du Nord, normal. Aux Bahamas qu’il aperçoit au loin,en transit 800m plus bas. Il prend l’avion, l’avion pèlerin, celui qui atterrit au fond.

Que fait-il alors ? Les enregistreurs ne le disent pas. C’est la limite du truc. Si ça se trouve, il entre en hibernation, comme le pensaient les anciens. La saison s’y prête drôlement.