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21/03/2011

Combien reste t-il de grands requins blancs dans le monde ?

 

L’université de Stanford en Californie a récemment publié les conclusions de la première étude recensant sérieusement une population de grands requins blancs. Celle du Pacifique Est, qui se déplace entre la Californie, le Mexique et Hawaï en passant par ce lieu de rendez vous en pleine mer, ce  « bar sous marin » où les requins se regroupent, sans doute pour boire des coups ensemble.

Après plusieurs mois d’enquête, de marquage, de photographies, de tracking ; et une fois appliquées certaines variables de correction minutieusement calculées, cette étude en arrive à la conclusion que l’on pouvait redouter : il reste très peu de grands blancs dans le monde.

Pour cette zone, les scientifiques se sont arrêtés au chiffre de 219 individus (environ 170 ayant été observés et ré-observés. On estime donc que 50 spécimens ont échappé aux enquêteurs).

De façon assez peu rigoureuse, il semble qu’à partir de ce chiffre on puisse pour la première fois extrapoler la taille de la population mondiale de grands blancs. Non pour en avoir une idée précise, ce serait un peu ambitieux vu le matos, mais plus pour avoir un ordre d’idée. Lors de mes passages dans la région du Cap en Afrique du Sud, je me suis aperçu que les experts locaux avaient marqué et identifié environ 700 spécimens différents de grands blancs qui revenaient annuellement sur les lieux, pour une période moyenne d’une semaine. Si on applique la même variable de correction que les californiens, il faudrait ajouter à cela environ 200 spécimens non observés. Nous aurions donc affaire à une population d’environ 900 individus. Admettons que la population australo-neo zelandaise soit de la même taille  - alors même qu’il ya des échanges entre les 2 populations, comme l’a démontré Nicole, cela ferait 1800 requins à ajouter. N’oublions tout de même pas ceux de Méditerranée. Sachant qu’ils ne sont pas observés chaque année, mais plutôt une année sur deux, leur nombre doit flirter avec la variale de correction : admettons donc qu’ils soient 60.

 Et ceux de l’Atlantique (Canada, US)? Au piffe, je dirais 150.

En tout, ça fait environ 2230 requins blancs dans le monde et ça ne fait pas beaucoup.

 

25/01/2011

Plongée N°3 : La Nevera, Malpelo, Colombie, le 16 Novembre 2010

 

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Un groupe de requins marteaux passant devant l'observatoire de La Nevera

 

 

 

La Nevera, qui signifie le réfrigérateur en espagnol, est située sur le côté ouest de l’île de Malpelo, au large de la Colombie. De tout mon séjour, j’ai dû plonger au moins 5 fois à cet endroit. Il faut reconnaître que c’est là que le flux de requins marteaux est le plus constant. Certes, on voit des marteaux un peu partout à Malpelo, mais nulle part avec la même régularité qu’à la Nevera. Tout du moins, pendant mon séjour.

Lors de ma première plongée sur ce site, il y avait un peu de courant et je me laissais entraîner trop rapidement hors de la zone la plus intéressante. Pas besoin de couvrir beaucoup de distance à la Nevera. Je devais l’apprendre par la suite.

La dépose se fait assez près de l’île. A une dizaine de mètres de la falaise. A flanc d’abîme. De là, on descend directement jusqu’à 25m pour trouver la pente de la montagne que l’on suit aussi longtemps que l’on veut. A 35 m la pente s’adoucit et fait place à une étendue de sable qui descend. Je ne sais pas jusqu’à quelle profondeur.

Je descendais jusqu’à 40 m pour apercevoir deux ou trois marteaux qui tournaient au dessus du sable. L’un s’approcha doucement. Il dodelinait de la tête comme pour mieux se faire filmer. Pour mieux se faire nettoyer en fait, car la Nevera, comme Malpelo en général est une station de nettoyage, un endroit de repos pour les marteaux. Ils ne s’approchent pas du récif pour se nourrir, on les voit souvent nager dans le sens du courant, chose que ne fait jamais un requin en mode chasse.

Distinguant d'autres requins un peu plus loin, je poursuivais tout en filmant jusqu’à 45/50m, accompagné par un plongeur italien, mais laissant derrière moi ma femme que son Suunto Vyper n’autorisait pas à descendre plus bas. Ce fut alors « comme une apparition ». Un mur de requins marteaux se dessinait devant moi à une vingtaine de mètres. L’heure de pointe ? Il s’agissait de tout un groupe de petits spécimens (1m50/2m)). Il devait y en avoir entre soixante et quatre-vingts. Peut-être plus, impossible à dire, la visibilité ne me permettant pas de voir au-delà. Hélas, le flot de requin se tarît un peu vite. Alors que je me mettais déjà dans la peau d’un piéton s’apprêtant à regarder passer Pari roller un vendredi soir d’été, quelle ne fut pas ma déception de les voir repartir aussi vite qu’ils étaient venus. Le tout dura quelques poignées de secondes, pas plus. Ils disparurent au delà du rideau de la visibilité, au dessus du sable, comme des fantômes. L’instant d’avant, ils étaient partout et, tout à coup, il n’y en avait plus un.  Ils s’en étaient allés comme un seul requin, parfaitement synchronisés.

Quoiqu’il en soit, j’étais déjà  entré en décompression d’environ 7 mn et il était grand temps d’amorcer la remontée. Pas vers la surface, je vous rassure, mais vers l’observatoire. Nous remontâmes l’étendue de sable vers la paroi rocheuse, récif côté gauche, pour aller nous installer à l’observatoire. L’observatoire, c’est le lieu où il faut être à la Nevera. Il s’agit d’un promontoire rocheux donnant sur le bleu, situé à entre 20 et 25, qui a le bon goût de comporter plusieurs roches plates sur lesquelles les plongeurs peuvent s’installer. Une fois en place il n’y a plus qu’à attendre en regardant arriver le trafic sur sa droite. Je m’installais, retrouvant là deux autres plongeurs espagnols qui filmaient un documentaire. Nous restâmes quelques minutes, le temps de voir passer deux petites formations de trois puis six requins marteaux. Le nombre était compensé par la taille des animaux qui était nettement plus imposante que celle du groupe rencontré plus bas. Mérous et carangues, nous tinrent compagnie entre les passages. Les minutes de décompression s’empilant les unes sur les autres, je décidai de rentrer, laissant à mon plus grand regret mes collègues espagnols avec un troisième groupe de 4 marteaux qui passaient.

Mon compagnon italien me suivait et nous aperçûmes alors à 10/15m, notre palanquée de départ (pour votre information chaque plongeur possédait un système de localisation permettant de signaler sa position à son buddy et au bateau en cas de difficulté). En remontant j’aperçus le long de la paroi un requin à pointe blanche qui ne justifiait pas à un arrêt. Arrivé à 10m nous nous éloignâmes de la paroi et commençâmes, un palier de 14mn. Au bout de dix minutes, nous fûmes gratifiés de la visite d’un banc de thons albacores. Il devaient être environ 300 et défilèrent sous nos yeux sans s’attarder.

En sortant de l’eau, je souriais. J’avais dû voir pas loin d’une centaine de requin en une plongée.

Plongée extraordinaire ? Sans doute. On vient à Malpelo pour ses bancs de marteaux notamment et j’en avais aperçu un. Mais on attend tellement de Malpelo que je restais un peu sur ma faim. Combien y avait-il de requins dans ce groupe rencontré en bas ? Il n’avait peut-être manqué qu’un peu plus de visibilité pour en distinguer une centaine de plus. 

 

 

08/12/2010

La protection des requins à Malpelo

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Le Nemo, amarré à un navire de la marine colombienne à Malpelo, Novembre 2010.

 

 

 

Malpelo, située en plein Pacifique, à 500 km de la côte colombienne, est un sanctuaire pour les requins, notamment pour les requins marteaux et les requins soyeux que l’on trouve autour de l’île regroupés en bancs de plusieurs dizaines, voire centaines d’individus. C’est la concentration plus que la rareté des espèces qui en fait un endroit unique, à la notable exception d’une variété endémique de requin féroce découverte récemment.

 

 

Malpelo qui s’élève d’environ 300 m au dessus de l’eau pour l’îlot principal, constitue la crête émergée d’une montagne sous marine, la dorsale de Malpelo. Alors que la surface de l’île n’est que 3,5km2, la dorsale s’étend elle sur 296 km de long et 90 km de large. C’est dire que la surface à protéger dépasse de loin la superficie de l’île. C’est pour cela que la zone du Sanctuaire de Faune et de Flore de Malpelo a évolué en trois étapes pour atteindre sa taille actuelle qui couvre un périmètre 90 km sur 90 km et semble enfin à peu près suffisante.

 

L’espèce ciblée par la pêche à Malpelo, c’est le requin, même si d’autres espèces comme le thon sont présentes en abondance. Elles peuvent être pêchées ailleurs, avec moins de risques. Tandis que rares sont les endroits où les requins se concentrent comme autour de cette île qui est une oasis dans un désert d’eau. Ils ne s’en éloignent que d’une quarantaine de kms maximum pour se nourrir, avant de revenir autour de l’île se faire nettoyer.

 

Reste que ce sont des pélagiques et qu’ils transitent. Il y a une inter-connectivité entre Malpelo et ces autres îles que sont les Galapagos en Equateur, Cocos au Costa Rica et Coïba au Panama. Des requins marteaux marqués à Malpelo ont été retrouvés autour de chacune de ces îles. Les tortues marines, les mammifères marins et d’autres pélagiques utilisent également ces itinéraires bleus entre ces montagnes sous marine qu’on appelle corridors marins. Les pays concernés par ces migrations se sont rejoints pour créer le CMAR, un corridor marin protégé reliant ces îles. Ces initiatives semblent néanmoins en réalité encore balbutiante, faute de moyens de surveillance.

 

 

La Colombie, parmi les pays cités, paraît de loin être la plus volontaire. Pour les autres, les choses sont plus problématiques. Le Panama, dont la complaisance maritime n’est plus à prouver, abrite sous son pavillon de nombreux pêcheurs illégaux. Quant au Costa Rica, qui faillit sortir du CMAR il y a peu suite aux pressions de lobbies de pêcheurs, sous des apparences fermes, on le découvre très laxiste : le respect des zones protégées laisse pour le moins à désirer, que ce soit du fait du manque de capacité à le faire respecter ou de la corruption. On m’a informé ainsi que des taupes de la marine costa-ricienne renseignaient régulièrement les pêcheurs commandités par les cartels taïwanais sur la présence des navires de contrôles. Quand on sait que de son côté l’Equateur soutient encore régulièrement le Japon dans sa lutte pour l’obtention de quotas supplémentaires de pêche à la baleine, on se dit que la partie est loin d’être gagnée.

 

Lors de mon séjour a Malpelo, nous étions amarrés à un navire de la marine colombienne en permanence (les endroits de mouillages ne sont pas légion). Un autre navire parcourait la zone dans le même temps. Je ne l’ai jamais aperçu. L’un de nos guides m’informa que c’était la première fois qu’il constatait une présence militaire en cinq voyages en 2010.

 

Selon la fondation Malpelo, au cours des 7 dernières années, le nombre de prises illégales de requins aurait diminué de 80%. Il s’élevait à environ 13 tonnes aux alentours de 2003, ce qui représentait environ 65 000 requins tués. Je ne sais pas sur quelles bases ces mesures reposent, mais il est par définition toujours difficile de juger de l’ampleur d’un commerce qui se déroule dans l’ombre. Lors de mon séjour sur l’île, nous avons quand même trouvé 2 ou trois morceaux de lignes et de filets montés sur des bouées.  Les pêcheurs sont donc bien là, à jouer plus ou moins à cache-cache avec des militaires fort mal équipés. Leurs bateaux sont des rafiots lents et peu dissuasifs. Souvent, faute d’avoir pu arraisonner les vaisseaux coupables, ils doivent se contenter de rapporter leur immatriculation aux autorités compétentes de leurs pays respectifs. Autant dire que pour certains, le risque est faible voire inexistant.

 

Ce trafic, dérisoire à l’échelle mondiale, bien que beaucoup moins juteux que le trafic de la drogue, n’est pas négligeable à l’échelle de pays comme la Colombie et ses voisins.

 

La Colombie qui a combattu bien d’autres formes de criminalité ces dernières années semble s’être attaqué à celle-là. Il lui revient de s’assurer qu’en contrepartie, elle saura dégager des revenus de substitution qui combleront le manque à gagner et qui encourageront dans cette voie. A cet égard, Malpelo pourrait facilement accueillir 3 bateaux de plongeurs à la fois, sans que la vie marine n’en soit bouleversée, ni que les plongeurs ne se croisent sous l’eau. Ils pourraient même échanger des infos intéressantes sur les sites de plongée. Un éco-tourisme profitable pour tous serait peut-être un argument convaincant, même s’il ne peut être qu’une réponse partielle au désarroi économique que connaissent les régions côtières qui se sentent en manque quand la drogue ou la rébellion n’arrondissent pas leurs fins de mois. 

 

07/12/2010

Red Alert

Et voilà, une nouvelle attaque de requin à Sharm El Sheikh. A Naam'a Bay qui plus est. A quelques mètres des restaurants de plages pourris bourrés de russes, d'italiens et de touristes en tous genres. Ce coup-ci, c'est tombé sur une touriste Allemande, à un endroit où les apprentis plongeurs passent leur premier niveau et où l'on ne voit généralement rien d'autre que des poissons de récifs. Cette histoire devient très étonnante

En tous cas, deux hypothèses peuvent déjà être écartées : tout d'abord le rôle qu'aurait pu jouer la vodka dans les précédentes attaques, mais aussi le fait que le coupable ait pu être capturé le jour précédent, suite à la brillante campagne de chasse au requin décrétée par le gouvernement Egyptien.

2 spécimens capturés avait alors été présentés comme les possibles agresseurs. Un Oceanic Whitetip, espèce formellement identifiée lors de deux attaques à répétition, ainsi qu'un Mako, espèce qui avait apparemment également été identifiée. L'Oceanic Whitetip, ne correspondait finalement pas au signalement de l'agresseur qui avait été filmé par des touristes, peu avant l'attaque (ce qui démontre, si besoin était, l'intérêt de ce genre de mesures). Quant au Mako, quelle ne fut pas ma surprise d'apprendre qu'il était sur la liste des suspects. Après de nombreux voyages en Egypte, c'est la première fois que j'entends parler de la présence de cette espèce, qui plus est sur un site de plongée où l'on s'estime heureux quand on aperçoit un blacktip ou un pointe blanche de récif! C'est en tous cas la photo du malheureux Mako pêché en représaille qui a fait la une des journaux.

Mako ou pas, la présence de grands requins du large au bord est de plus en plus surprenante. Souvent dans le passé, on s'est aperçu que quand un grand nombre d'attaque survient sur un petit périmètre, ce n'est pas le fait d'un unique requin tueur, mais plutôt la conséquence de la présence massive de requins, y compris du large, attirés par une source de nourriture, qu'il s'agisse de bancs de poissons ou d'une source très odorante de viande en décomposition : cétacé mort, cargaison de viande avariée déchargée en mer etc. C'est peut être de ce côté là qu'il faudrait chercher.

02:28 Publié dans Requinades | Lien permanent | Commentaires (0)

04/12/2010

Plus rouge la mer

Comme vous l'avez peut être lu ces derniers jours quatre touristes russes ont été attaqués par un ou des requins en mer rouge. Je ne connais pas les circonstances exactes de cette nouvelle attaque mais je vous renvoie à ce sujet sur le dernier d'une longue série de posts dont le dernier remonte au 6 Juin 2009.

Saluons le gouvernement égyptien dont la décision de lancer une chasse au requin pour éliminer le coupable me paraît vraiment être la bonne. 2 gros requins Longimanus capturés et sans doute bien d'autres représentants d'espèces totalement inoffensives : à coup sûr ils tiennent le coupable. le vrai problème est que c'est le deuxième gros accident avec ce type requin. La vraie question, si les informations sur l'espèce concernée sont confirmées est pourquoi se rapproche t-il des côtes alors que c'est un requin du large? Le parfum de la vodka peut être.

13/10/2010

Meilleures plongées, Pinnacles, Ponta Do Ouro

Cela fait bien longtemps que je n’ai pas publié de post digne de ce nom. Ce n’est pas par négligence ou par paresse, juste que je n’avais grand chose à dire. L’impression d’avoir déjà abordé bien thèmes que nourrit l’actualité. Pas grand chose de neuf. Je n’aime pas reproduire les informations que l’on trouve ailleurs, métastase déplaisante de bien des blogs, tout au plus m’autorisé-je de temps en temps un point de vue propre sur une information qui ne l’est pas. Ce que je préfère cependant, c’est raconter des choses que je n’ai pas lues ailleurs, mais là encore je ne lis pas tout. Il me faut donc recharger les accus. Ce que je vais faire dans un mois, en partant plonger dans le Pacifique, histoire d’éviter les immersions dans le Pathétique. Je vais faire le plein d’histoires de requins, histoires de premières mains. Du moins, je l’espère. En attendant, pour ne pas me défausser une fois de plus, je vais vous raconter une plongée que j’ai faite l’année dernière, en 2000neuf.

Il m’est arrivé de voir plus de requins, de beaucoup plus près, mais cette plongée reste gravée car elle est si proche, si facile. Il suffit de prendre l’avion jusqu’à Johannesburg, de conduire 600 kms jusqu’à la frontière du Mozambique où vous attend un rastah local en pick up qui vous emmène 8 kms plus loin à Ponto Do Ouro. Un zodiac vous y attend.

 

 

Plongée N°4 : Pinnacles, Ponta do Ouro, Mozambique, Avril 2009

 

 

The Pinnacles. Enfin ! C’est là, à quelques encablures de la frontière sud-africaine que j’aurais dû voir mes premiers requins dans les années 90. La nature commençait tout juste à reprendre ses droits, après 16 ans d’une guerre pas très civile, et se montra à nous dans les magnifiques atours d’un très venimeux Puffadder. Les mines anti-personnel ne prenaient plus racines, mais fleurissaient encore un peu. L’une d’elles avait d’ailleurs explosé sous le 4X4 d’un ami, peu de temps avant (par miracle sans atteindre celui-ci) alors qu'il essayait naïvement de capter le réseau de téléphone portable sud africain, du haut d’une dune. J’étais alors un plongeur débutant et Pinnacles se déroba à moi le dernier jour, pour cause de mauvais temps.

 

Il me fallait donc retourner à la Pointe d’or. Retourner à Graceland (qui a changé de nom), ce bar dont les escaliers ne sont mémorables que dans un sens.

 

Le jour précédent, j’avais vu mon premier requin baleine (après tant de rendez-vous manqués) et je retournais pour la deuxième fois du séjour sur Pinnacles. J’avais déjà été gratifié de la présence de quelques requins du Zambèze, le jour précédent et j’en redemandais. Nous sortions d’une semaine de vacances des sud africains où les lieux avaient été archi peuplés de plongeurs et où le gros était parti élire momentanément domicile ailleurs. Les sud africains partis, les habitants revenaient occuper leur territoire. Nous le constatâmes.

 

Le problème, une fois les sud africains partis est de trouver suffisamment de plongeur pour aller sur Pinnacles. Le récif est éloigné et la sortie n’est rentable pour l’opérateur qu’à partir d’environ 7 plongeurs. Je me chargeais d’une partie du recrutement. Force est de constater que tout le monde ne veut pas plonger sur Pinnacles.

 

Mis à part Protea Banks en déclin, Pinnacles est l’un des derniers endroits d’Afrique Australe où la présence du requin bouledogue (aka requin du Zambèze) est presque garantie, pour peu qu’on évite l’heure de pointe. C’est surtout lui que l’on vient voir.

 

Comme Protea, Pinnacles est une plongée en dérive. On vous lâche généralement là où la concentration de requins bouledogues est censée être la plus forte. C’est pour cela qu’il faut faire une entrée négative et plonger rapidement vers le fond (35 m-40m) environ.

C’est ce que je faisais ce jour-là. Tout de suite, arrivé à 20 mètre j’apercevais sur le fond un gros requin du Zambèze, probablement une femelle, interprétant la danse lente et zigzagante caractéristique de son espèce. Un mètre au-dessus du fond, elle s’économisait en minorant l’impact du courant. Je la survolais brièvement, hésitant à lui faire face en me posant sur le fond pour lui tirer le portrait. Elle était vraiment très grosse. 3 m quand même et calibrée comme un sumo. J’auto-justifiais ma frousse en me disant qu’elle était quand même à 40 m et que j’allais cramer pas mal d’air en la rejoignant. Je repensais aussi à ce poisson scorpion sur lequel j’avais failli poser la main en me posant comme ça, une fois, bêtement sur le fond, comme un con. Mais en vrai, j’avais un peu les jetons, ces mêmes jetons qui font que je n’ai jamais eu le moindre problème.

 

Quoiqu’il en soit, mes hésitations furent rapidement tranchée quand j’aperçus mes compagnons qui s’éloignaient en regardant dans la direction d’un requin marteau qui nous contourna comme un avion de chasse. Les bombardiers n’étaient pas loin.

Alors que nous continuions à dériver au dessus du Pinnacle, nous tombâmes sur deux autres requins du Zambèze, plus petits cette fois qui tournaient à mi-eau puis au fond. A 20 mètres, j’en aperçus un troisième, de face, qui s’approchait juste dans ma direction.

Le moment où le vidéaste ne vit plus l’événement, mais vit de le filmer.

J’avais déjà vu plein de requins bouledogues. Ce que je voulais ce jour-là, c’était un gros plan de face avec le bleu pour seul fond. Trop préoccupé par ma prise, je ne remarquais pas que le museau était un peu aplati pour un bouledogue. Son arrivée de face masquait sa taille. Il se mit de côté et là, je m’aperçus qu’il ne s’agissait pas d’un bouledogue mais d’un requin tigre de 4m. De façon surprenante, les rayures étaient très marquées pour un individu de cette taille. Peut-être n’avait-il pas terminé sa croissance ? Evidemment, la surprise me fit rater la prise. Normal. C’est tout mon problème. Je ne filme que pour graver à titre personnel. Après s’être présenté de profil, le tigre s’en alla nonchalamment, tandis que je zoomais et dézoomais comme un abruti. Au montage, je réalisai qu’ un marteau se promenait derrière.

 

C’est peut-être lui, d’ailleurs, qui nous rendit visite juste après. Lui ou son congénère, puisqu’ils furent deux marteaux hallicornes à venir nous dire bonjour alors que nous continuions à dériver. Alors qu’il s’éclipsaient momentanément, un Blacktip vint à notre rencontre dans le plus pur style Blacktip : contre-courant, je fais le tour, je reviens voir d’un peu plus près en passant par derrière un peu nerveux et je me casse. Pas de sardine, pas d’intérêt.

 

Alors que j’avais été masqué par mes camarades de palanquée lors des premiers passages de marteaux, l’un des deux, sans doute, revint directement de mon côté. Mon côté un peu plus profond, un peu plus seul, un peu plus planqué, un peu plus tranquille. Il s’approcha d’une nage rapide et saccadée, puis s’en alla plus brusquement à 20-25, fit soudainement demi tour et revint directement sur moi, s’arrêtant à deux mètres, légèrement au dessus. On aurait pu croire qu’il venait poser, mais il s’agissait plus certainement d’un jeune en pleine chasse attiré par mon objectif grand angle qui produisait un beau reflet argenté. Il s’éloigna presque aussi vite qu’il était venu, un peu déçu. Nous nous laissâmes dériver quelques instants de plus au passé simple en croisant un dernier petit bouledogue qui ne retint que vaguement notre attention. Le meilleur était passé, le reste était imparfait.

 

4 espèces en une seule plongée. C’est simple, c’est là, ce n’est pas si loin. Pinnacles. Ponta Do Ouro.

10/06/2010

le requin remord

Les dents des requins sont extrêmement infectieuses, pour la seule et unique raison qu’ils ne les lavent presque jamais.

Même ceux aux longs ailerons, aux grandes dents, même les petits grands blancs, même après le déjeuner. Même ceux qui n’ont plus de dents...

 

.... ou qui n’ont que leurs oreilles pour pleurer.

04/01/2010

Les requins blancs s'attaquent eux-mêmes

Un requin blanc se cachait dans le noir. Il nageait à quelques centimètres du fond, tôt, très tôt le matin, avant que les rayons du soleil ne le dénoncent. Quand le soleil est au zénith, les profondeurs perdent de leur intimité.  Il faut savoir en effet que le requin blanc se cache dans la noirceur du fond comme les léopards se cachent dans les buissons. Comme le léopard, il chasse à l'affût.

A la surface, il aperçut la silhouette d’un autre requin blanc qui lui ressemblait étrangement et qui se tapissait en haut, de l’autre côté, sur l’autre fond. Un requin qui lui était en tous points semblable, à ceci près que ce n’était pas lui. Un requin symétrique.

Il remarqua alors les jambes d’une baigneuse qui perçaient la surface, bercées par les rayons obliques du soleil du matin.  Il tourna alors rapidement sur lui même, pris son élan et s’élança. La profondeur était de 18 m. Il allait l’annuler plus vite que ça.

Plus il s’approchait de la surface, plus les réflexions prenaient de la place dans son cerveau en Y de requin blanc. Plus il remontait, plus c’est son image qu’il apercevait se reflétant dans la surface. C’était bien lui qu’il voyait. Du reflet de sa bouche sortait les deux jambes de la baigneuse, comme de longues dents désarticulées.

Ne pouvant stopper, ni même ralentir son ascension, emporté par son élan, il se saisit de cette paire de jambes, convaincu d’avoir perdu son temps, convaincu au final de s’être fait mal à lui même. Inutilement.

04/12/2009

Jaws : Metaphor of a Serial Killer

How could one speak of men and sharks without mentioning the story that has been bonding them for the last 30 years : Jaws, a perfect example of anthropomorphism.

In a society that has expelled all the threats at its boarders, which has made violence become abstract, a ferocious beast comes up from the abyss to stalk peacefull holidaygoers.

Fear, at last, has a face that one can visualize. Ironically, Man feels threatened by an animal on the brink of extinction.

True, a white symbol death, cold and mechanic, can at any anytime interrupt innocents swimmers lives. It can stalk anywhere (in shore or offshore), at any time (day or night). It can attack anyone (men, women, children and even domestic animals). Doesn’t it remind you of someone else ? The beach is a metaphor of urban no man’s lands. A beach is a Society in transit which lays its differences like a towel. The perimeter of the towel resembles the fences of those small suburban houses. The family close by resembles those neighbours that we see all year long, but that we hardly know. Our neighbours are anonymous and won’t be of any help if a danger threatens us. We are alone in the middle of a crowd, like preys on a train platform. Everybody knows this, populations in transit are the prime target of blind and anonymous killers. A cheetah will only kill one impala at a time, but the whole herd is its prey. As a result the whole herd feels a little nervous.

The threat is permanent, omnipresent because it cannot be confined. Being nowhere it is everywhere. The risk is small, but this small probability is compensated by the very nature of this risk : being sliced and eaten alive. The price to pay seems even higher because the risk is small. One can notice that the this description fits perfectly the portrait of the ideal killer. It is a white male. He is solitary and its jaws are covered with seven rows of pointy teeth. He is called the great white, which he is, but only seen from below. He haunts the blue of our psyche and lives in the depths of our unconsciousness. His back, on the contrary to its belly, is black like the abyss. Its teeth are the hidden memory of ancient days when our skin was permanently at risk of being cut open. They are the proof of a frailty which is essential to us, of a fear which will always be there, at hand, like a kitchen knife. Maybe the great white is somehow reassuring, like those serial killers whose number remains stable despite our growing interest for them. As long as we will be scared of him, we won’t beware of our own selves and he will remain the only victim of an adult fairy tale in which he should play no part. The supposedly killing machine is in fact the victim. 

12/10/2009

Tourner en rond

Ces derniers temps la sharkuterie s’est un peu dispersée sur tous les supports : blogs, mails, sms, en des contrées non requinesques. Mais le squale finit toujours par revenir tourner en rond où qu’il se trouve. En rond, où le même endroit est le même envers. Le squale revient toujours à la sharkuterie. Et ces prochains temps, il sent qu’il va y passer beaucoup de temps, beaucoup de temps à y tourner en rond voire, comme l’hiver approche à grands coups de palmes, y hiberner.

A bientôt, pour des articles très froids venus d’en bas.

12/08/2009

Les morsures du requin tigre

Le requin tigre est de ces requins qui pour mieux appréhender un objet ou un élément nouveau finissent par le mordre, pour le goûter et ainsi mieux le connaître. Les anglais utilisent l'expression "to mouth". Souvent le requin tigre s'éloigne après cette morsure initiale. Nombre de cas répertoriés comme des attaques sont ainsi des morsures exploratoires, sans arrière-pensées.

Comme tous les requins et bien qu’on n’ait jamais à ma connaissance assisté à un accouplement, le requin tigre s’accroche probablement à sa partenaire en saisissant entre ses mâchoires son aileron dorsal pour s'agripper à elle. L'amour lui fait souvent perdre des dents.

Parfois, le requin tigre rêve d’une existence ou il ne serait pas nécessaire de mordre pour faire connaissance.

30/07/2009

sharks and symbolism

“There isn't any symbolism. The sea is the sea. The old man is an old man. The boy is a boy and the fish is a fish. The shark are all sharks no better and no worse. All the symbolism that people say is shit. What goes beyond is what you see beyond when you know.”

 

Ernest Hemingway

27/07/2009

Plus vite qu'un requin

"Il n'est pas nécessaire de savoir nager plus vite qu'un requin, il suffit de savoir nager plus vite que la personne qui se baigne avec vous."

 

Kevin Nilon

07/07/2009

Les absences du requin pèlerin

Le requin pèlerin doit son qualificatif aux premières observations répertoriées qui se basaient sur les apparitions saisonnières de cet animal de passage ; passage qui finit par s’installer pour devenir son essence, avec une certaine connotation religieuse qui ne vous aura pas échappé. Le requin pèlerin est en effet un requin en pèlerinage. On supposait alors, bien entendu, que l’objet de ce pèlerinage était nos côtes qu’il visitait en été. Personne ne connaissait alors les Maldives, qu’il ne visite d’ailleurs jamais..

Ce qu’il faisait le reste de l’année, notamment pendant les longs mois d’hiver, fut longtemps sujet à conjectures. Nombreux furent ceux qui tentèrent ou furent tentés par la thèse de l’hibernation. Il faut dire que la saison s’y prêtait.

Rien ne confirmait, ni n’infirmait leurs dires, si ce n’étaient les disparitions fantomatiques de l’animal. Ses absences à répétition. Il devait partir vers le bas, mais qu’y faisait-il au juste et où. ? On l’imaginait un peu plus loin et beaucoup plus profond. Plus tard on imagina qu’il suivait le plancton en des régions marines isolées.

Aujourd’hui, le doute a de moins en moins de place. Tous les ballons sont crevés et presque tous les mystères sont percés. Les bateaux disparus aux Bermudes sont sortis d’une brume liquide grâce aux sonars et autres voyeurs aveugles des fonds. Il était donc normal que tôt ou tard l’hibernation des requins pèlerins refasse surface.

C’est chose faite depuis peu. On a enfin réussi à marquer le requin pèlerin avec de petits enregistreurs de données qui tiennent suffisamment de temps accrochés à l’animal pour suivre ses moindres mouvements. C’est tout récent. Ca date d’il y a à peine un an.

Et qu’a t-on découvert au juste de bien intéressant? Que le requin pèlerin se livre à un long pèlerinage circulaire, qu’il tourne en rond comme sied à son espèce. Il tourne inversement au sens des aiguilles d’une montre, emporté dans le tambour de la machine à laver du Gulf Stream.

Où passe t-il l’hiver nordique ? Au sud du Nord, normal. Aux Bahamas qu’il aperçoit au loin,en transit 800m plus bas. Il prend l’avion, l’avion pèlerin, celui qui atterrit au fond.

Que fait-il alors ? Les enregistreurs ne le disent pas. C’est la limite du truc. Si ça se trouve, il entre en hibernation, comme le pensaient les anciens. La saison s’y prête drôlement.

03/06/2009

Accident waiting to happen

C’est la formule qu’utilisent les anglo-saxons pour qualifier un certain type d’activité dont la fin tragique n’est que trop prévisible. Il y a quelques temps, mois, années peut être, dans un article intitulé « la réputation du longimanus est-elle justifiée ?», j’avais décrit les comportements stupides et dangereux auxquels se vouaient certains plongeurs en croisière en mer rouge avec la bénédiction de certains opérateurs . Ce qui devait arrivé est arrivé : une femme a été tuée ces derniers jours par un requin au sud de la mer rouge lors d’une de ces croisières.

 

Quand pour la première fois, je vis en 2003 des longimanus aux Brothers, un des guides de plongée me montra des clichés pris à Elphinstone de ces mêmes requins chargeant les plongeurs. Le guide admit que pour obtenir ces clichés il avait du appâter les requins  au moyen de carcasses de poulets. Deux ans plus tard, à Elphinstone, je vis des touristes jeter de la nourriture aux longimanus depuis un bateau. Quand je leur criai d’arrêter, ils réagirent comme face à un mauvais coucheur.

 

J’ai vu ce requin plusieurs fois en mer rouge. Elphinstone, les Brothers, Daedalus et Habili Ali. Je suppose que c’est sur l’un de ses sites que l’attaque a eu lieu. Le communiqué parle d’un récif au sud de Marsa Alam, donc a priori pas Elphinstone, mais allez savoir avec les communiqués. Pas sûr non plus qu’il s’agisse d’un longimanus, le communiqué ne le précise pas. Il pourrait tout aussi bien s’agir d’un requin soyeux, mais bon, je mettrais quasiment ma main à couper, façon de parler, que c’était bien lui. L’aileron blanc du large.

 

Penser que l’on puisse nourrir un longimanus à la main en snorkeling comme cela semble avoir été le cas semble totalement délirant pour celui qui connaît un peu les requins. Cousteau désignait ce requin comme le plus dangereux à son sens. C’était très exagéré, mais de là à le confondre avec un caniche, il y a un grand pas que je ne sauterais pas. Il n’attaque certes pas beaucoup plus souvent que le caniche, mais la morsure est un peu plus dangereuse, surtout quand on se trouve en pleine mer dans un pays qui ne dispose pas d’hélicoptères de secours.

 

Ce qui me désole le plus dans cette histoire, c’est le comportement des opérateurs. Que les touristes ne mesurent pas les dangers que peut présenter cette espèce une fois excitée est une chose, mais que ceux qui le savent ne les préviennent pas en est une autre. D’autant plus que d’autres incidents s’étaient déjà produits, soigneusement cachés au grand public.

 

Le requin océanique est un requin du large, à l’affût de la moindre opportunité. Il défie souvent les plongeurs avant de s’éloigner. Il les teste, sait-on jamais. Je l’ai vu attaquer les parachutes oranges montant vers la surface de plongeurs au palier. C’est le plus beau requin qu’il m’ait été donné de voir. Mettez de la nourriture dans l’eau (n’importe comment de surcroît), vous en ferez malgré lui un tueur potentiel.